Petit conte de Noël
Cette année-là, une jeune famille aux parents vraiment occupés emménagea dans la maison de leurs rêves. Après des années de labeurs et d’économie, ils nichèrent à quatre dans un confortable quartier du 450, sur une rue tranquille, pour permettre aux enfants de s’y amuser sans que leur maman, une mère poule avouée, s’arrache les cheveux en pensant aux accidents.
Il s’agissait d’une demeure toute neuve, il fallait donc la paysager. Les parents s’échinèrent encore à besogner comme des fous pour gagner assez de sous afin d’offrir à leur belle maison des arbres dignes de ce nom. N’y connaissant rien en aménagement paysager, ils embauchèrent une dame à la voix chantante et un peu originale, spécialisée en la matière. Leur message était clair : « Il te faut créer un écrin de verdure, car nous adorons la nature ». Dès le printemps, le terrain sur lequel reposait la jolie maison se transforma en oasis.
Trônait au milieu du terrain, un arbre déjà majestueux, au feuillage de dentelle et d’un vert tout tendre. La dame avait assuré aux propriétaires qu’il demandait très peu de soins, car bien qu’amants de forêt, ils disposaient de peu de temps pour s’en occuper.
Et les années passèrent, les enfants grandissaient à vue d’œil, les parents qui bossaient bien fort décidèrent d’acheter un chalet, histoire de profiter de ce cocon familial qu’ils souhaitaient tissé serré.
Les arbres continuèrent donc de pousser, mais aucun membre de la famille n’y faisait plus attention, la belle maison du 450 était finalement devenue une espèce de plaque tournante pour le travail et l’école en attendant l’évasion du vendredi vers le chalet du Nord, maintenant devenu l’ancre de la tribu.
Un chauffeur de taxi d’origine haïtienne croisa un jour le chemin de la maman, et par ses mots sages, il changea sa vie (voir le conte de Noël de l’an dernier !). Elle comprit alors toute la chance qu’elle avait, et surtout, qu’elle était riche d’une magnifique famille et que c’était tout ce qui importait.
Les paroles de l’homme déclenchèrent en elle une profonde réflexion, mais ce qui la poussa à l’action fut cet arbre majestueux planté par la dame à la voix chantante quelques années plus tôt.
C’est que la mère réalisa tout à coup qu’elle n’avait jamais vu d’arbre plus beau ni dans son 450 ni dans ses Laurentides d’amour. Pourtant, il était là toutes ces années, sans qu’elle y fasse vraiment attention.
Le vent faisait bouger ses branches secouant avec élégance les feuilles dans une danse végétale. Elle remarqua que leur couleur se transformait au gré de l’été, passant d’un vert presque transparent à un plus profond avant de tourner à l’orange l’automne arrivée.
Au lieu de seulement le regarder, la mère a commencé à voir pour vrai cet arbre magnifique planté quelques années plus tôt. Et c’est ainsi que sa vie changea.
Elle réalisa alors qu’elle n'avait jamais le temps d'observer, sa vie était un tourbillon qui ne lui laissait pas le loisir d’arrêter ni d’admirer, elle qui avait pourtant grandi chaussée de skis à parcourir les bois. Néanmoins, contempler son arbre était pour elle bien mieux qu’une journée au spa ! Un état profond de bien-être et de paix l’envahissait à seulement regarder les feuilles danser.
Il lui fallait maintenant trouver un moyen de ralentir, pour pouvoir arriver à bien regarder tout ce qui l’entourait, parce qu’elle comprit qu’à contempler et admirer, un bonheur tout doux s’installait en elle et qu’être ainsi en paix lui permettait de mieux donner aux autres.
Je vous souhaite donc à tous pour cette nouvelle année de trouver votre arbre, celui qui vous permettra d’enfin prendre le temps de respirer pour vous transporter dans ce petit lieu protégé et plein de bonheur. J’ai trouvé le mien, et mon monde à moi en est devenu meilleur.
Amour, paix et santé.
Anick