Une belle soirée de juillet, de bons amis et un apéro. Un agréable papotage va bon train et l’on parle évidemment de confinement, de la joie du télétravail et de ne plus avoir à affronter l’horrible trafic. On s’ennuie un peu des collègues et de la petite jasette autour de la machine à café, mais on ne manque pas les habits, cravates, et tailleurs : vive le linge mou, couette et lunette. On jase kilos par contre, parce que c’est que maintenant, on en a en un peu trop.
C’est que voyez-vous en télétravail, le frigo, ce traître, fait sans cesse entendre ses appels. On marche beaucoup moins, et il n’y a pas si longtemps les gyms étaient fermés. La balance de plusieurs a donc commencé à monter. Ça, c’est ma réalité depuis quelques années, parce mon changement de carrière a fait que j’ai collé mon popotin à une chaise de bureau au deuxième étage de ma maison.
Je suis en télétravail depuis cinq ans et moi qui était obsédée par ma ligne, j’ai décidé de faire un « let go », un laisser-aller quoi, et de choisir la santé au détriment de la taille de mon pantalon.
Oui, j’ai pris des kilos, mon médecin aimerait me voir plus mince. Moi aussi, d’une certaine façon, mais j’ai compris que ma minceur vient avec un prix que je n’ai plus envie de payer.
Dans ma jeune vingtaine, j’ai été végétarienne un an, et ce, pour la plus mauvaise des raisons : je voulais perdre du poids. Pas une bonne idée, j’ai abandonné, tu peux vraiment être végétarien et être en surplus de poids. J’ai donc commencé à contrôler tout ce que je mangeais, faisant le compte de calories avalées à tous les repas, sans faute.
Après la naissance de mon petit dernier, j’ai avalé des pilules apparemment naturelles, qui faisaient que la nourriture ingérée passait presque aussitôt par le bas. Vous me suivez ? J’ai vécu en buvant des laits fouettés protéinés et rien que ça, mélangé des sachets de poudre à de l’eau pour des pseudo repas me faisant consommer un gros 800 calories par jour et ensuite jogger 10 kilomètres sur ces 800 calories, j’ai fait des détoxs en avalant ce qui avait un air de « bouette », et j’en passe, la liste est longue.
Troubles alimentaires ? Peut-être. Mais je pense que cette liste de comportements est plutôt familière pour la plupart des femmes.
C’est aussi que je travaillais aussi dans une industrie où le paraître était hyper important (pour une femme), et évidemment que la minceur suivait. Et j’étais mince. Heureuse ? Moins. Parce que j’étais obsédée par la peur de gagner un kilo et de replonger dans ce malheur que je traînais et qui était lié à la taille de mes poignées d’amour, qui brillaient par leur absence, sauf à mes yeux.
C’est par des photos de moi à cette époque que j’ai compris que j’avais perdu la faculté de me voir comme j’étais vraiment. Je me trouvais grosse, pourtant j’étais vraiment mince. Finalement, si cette course à la minceur n’a pas vraiment fait mon malheur, elle n’a certainement pas contribué à mon bonheur.
Et c’est pour ça que j’ai laissé aller. Assez, c’est assez. J’ai choisi ma santé mentale et physique, l’alimentation saine avec des plaisirs gourmands de temps en temps, et de ne plus compter. J’accepte d’avoir gagné deux tailles de vêtement, de me trouver ronde sur les photos et de vivre avec ça, j’accepte même mes rides, mes lunettes, ma couette (ma dent croche) et Dieu qu’on est bien en vêtement mou.
Il n’y a plus de balance dans notre maison, car j’ai trop peur de retomber dans ce cercle infernal de la course aux kilos.
J’ai opté pour une vie équilibrée, et la santé dans mon assiette, sans plus ne jamais me priver, parce que je sais maintenant que je ne suis pas heureuse si je porte trop d’importance à mon poids. Et moi, j’ai juste envie d’être heureuse.
Je mange bien, je continue de faire du sport, je suis peut-être (un peu) moins séduisante qu’avant, mais à 54 ans, je sais que chéri m’aime pour ce que je suis. Et ce que je suis, c’est une femme intelligente, avec un bon cœur, généreuse, créative, drôle et un peu dingue. Ça vaut les deux tailles de vêtement en trop tout ça.
Donc, à vous qui avez accumulé des kilos en raison du confinement, cette course à la minceur vous rend-elle heureux.se ?
Oui, non ? Peut-être que, comme pour moi, est-il temps de choisir la santé au lieu de la minceur à tout prix, une fois pour toutes.
Anick